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Le presque inconnu Mangold a écrit des centaines d'oeuvres couvrant opéras, oratorios, lieder, concertos, symphonies et musique d'orgue. Pour ses oeuvres de chambre, il privilégie les formes classiques avec souvent une instrumentation particulière comme dans son quatuor où le second violon est remplacé par une contrebasse

A côté des compositions algorithmiques de ses débuts, vastes étendues abstraites - à ne pas confondre avec ' cérébrales ' - et magnétiques, il s'adonne de plus en plus volontiers - et le confinement y a sans doute aidé - à des échappées qu'il qualifie de plus ' intuitives '. A cet égard, Shimmering - qui paraît moins d'un an après les nocturnes éclosions de l'album éponyme (Night Blossoms) et qui tranche avec lui dès son titre - vient prolonger cette veine inaugurée avec Infinite Ascent en 2020. Interrogé sur cette simplicité nouvelle, Melaine Dalibert dit envisager la musique comme il envisage la gastronomie. Il aime varier les régimes, se nourrir de différentes saveurs, il ne dédaignera jamais la bonne chère comme il peut s'accommoder de nourritures rapides. Cette vaste gamme de goûts, cette volonté de ne pas se laisser enfermer ni étiqueter - musique contemporaine, ' modern classical ', minimalisme, ambient - transparaît dans les huit morceaux plutôt courts qui composent Shimmering. Nés très vite, enregistrés entre Bruxelles let la Soufflerie de Rezé, ils ont été pour certains discrètement parés d'arrangement de cordes signés de la multi-instrumentiste Margaret Hermant (qui a collaboré avec Johann Johannsson ou Stars of the Lid). Des cordes qui - au même titre que les traitements électroniques de l'ingénieur du son Fabien Leseure sur le bien-nommé Mantra, qui fait songer à Harold Budd - agissent comme autant de textures venant compléter les harmoniques et les résonances du piano, leur conférer un surcroît de profondeur de champ, ajouter à la densité atmosphérique de l'ensemble. Une densité particulièrement palpable dans les pièces pour piano seul : Prayer, dans laquelle le toucher de chaque note semble précisément soupesé et habité ; ou encore Six + Six, où l'usage de la pédale de sourdine participe pleinement à la dramaturgie d'ensemble, dont la prise de son fait pleinement partie. Ces huit lancinantes pop-songs sans paroles, instantanés d'autant états d'âme volontiers mélancoliques, doivent autant à Morton Feldman ou Philip Glass qu'à Ryuichi Sakamoto ou Peter Broderick. Elles n'en révèlent pas moins une personnalité musicale hautement singulière. Ce sont huit nouveaux petits cailloux blancs qui viennent prolonger le passionnant parcours d'un artiste qui, si l'on en croit le titre de son très beau disque de 2019, n'aime rien tant que cheminer.

Pour son quatrième enregistrement, le trio fondateur des Timbres retrouve avec bonheur la formation chambriste de son premier disque consacré à Rameau (Diapason d'Or, Flora 2014). Très loin de l'image d'un Buxtehude austère, ces sonates des Opus 1 et 2 surprennent par leur liberté, "ces progressions inaccoutumées, ornements cachés, colorations ingénieuses" (Johann Mattheson, 1739). On comprend le succès de leur publication à compte d'auteur (1694) puis d'éditeur (1696), en plein épanouissement du "stylus phantasticus" en Allemagne. Rares sont les ensembles qui se sont confrontés au défi de cette intégrale... mais le trio des Timbres - Yoko Kawakubo, Myriam Rignol et Julien Wolfs - y trouve un magnifique terrain de jeu où s'épanouissent leurs timbres ciselés et colorés, en une grande variété d'affects - à la fois sensibles et jubilatoires.

C'est à une jeune fille, en fait à une élève, qu'Armand-Louis Couperin (né à Paris, le 25. février 1727 - décédé à Paris, le 2. février 1789) lui consacra sa deuxième série de pièces pour clavecin. Anne-Louise-Marie de Beauvau-Craon (1750-1834) fait actuellement ses études au couvent de Port-Royal ; une éducation de la plus haute qualité qui comprenait les leçons de musique données par Couperin. La publication des Sonates en pièces de clavecin de Couperin marque la fin d'une interruption de quinze ans dans la production du compositeur, depuis la publication en 1751 d'un premier livre de Pièces de clavecin, dédié à Madame Victoire de France. La préface « Notice » commence par souligner la probité et la discrétion de l'auteur, qui, tout en se pliant aux sollicitations de ses amis, craint cependant le jugement du public, et qui se donne pour but, dans ce premier essai et après mûre réflexion, « d'y varier les couleurs et d'être nouveau » de mélanger et d'imiter les différents genres. « Sonates en forme de pièces de clavecin » nous en donne la clé : le renouveau du style français par l'introduction d'éléments italiens, ou plutôt par la naturalisation de la sonate italienne en incorporant ses nouveautés dans la tradition des clavecinistes français et de leurs pièces, dans une synthèse conciliant la tête et le coeur, nouvelle dans ses moyens et ses effets. Les ressources d'un clavecin accompagné d'un violon suffisaient à Couperin pour réunir toute la force et la vivacité d'un orchestre avec la grâce de mélodies variées

Personne n'est aussi éminemment personnel que Scarlatti : il n'obéit qu'à ses propres règles. Arrivé au Portugal à l'âge de 34 ans, il n'est encore qu'un compositeur conventionnel, dans l'ombre de son père, même s'il s'est fait remarquer comme un virtuose exceptionnel. Mais la découverte de cultures nouvelles agit sur lui comme un révélateur... Ce volume 5 continue l'exploration des sonates de Scarlatti par Pierre Hantaï.

Premier prix du prestigieux concours ARD de Munich, le Quatuor Arod s'est donné comme figure tutélaire un cheval imaginé par Tolkien dans Le Seigneur des Anneaux, symbole de force et de fougue. Après deux enregistrements remarqués, le Quatuor nous revient aujourd'hui avec des quatuors de Schubert enregistrés dans la sublime acoustique de la Chaux de Fonds : le célébrissime Quatuor N°14 "La jeune fille et la mort", le Quatuor N°4, ainsi que le 1er mouvement du Quatuor N°12 inachevé. Tout le lyrisme, la noirceur et le désespoir de Schubert sont exprimés ici avec une qualité et une autorité interprétatives rares.

Révélation instrumentale aux Victoires de la Musique Classique en 2016, la jeune et pétillante trompettiste Lucienne Renaudin Vary est un talent hors norme. En soliste ,accompagnée par l'Orchestre National de Lille ou avec la complicité de musiciens invités, elle nous livre avec "The Voice of The Trumpet" un cocktail détonnant d'énergie. Les grands classiques y côtoient des standards indémodables de jazz que la brillante musicienne interprète avec une fraîcheur et une virtuosité incroyables. Elle improvise ainsi en toute aisance avec Erik Truffaz dans l'arrangement de Summertime de Gershwin, et dialogue librement avec Rolando Villazon dans l'air de Donizetti. Le premier album de Lucienne Renaudin Vary entre classique et jazz à découvrir de toute urgence. Une étoile est née !

Schubert en Trio... et en famille ! Sous le regard attendri mais rigoureux de Denis Pascal, grand spécialiste de Schubert dont il restitue magistralement les couleurs et la perfection formelle, ses fils talentueux - le violoniste Alexandre Pascal et le violoncelliste Aurélien Pascal -, abordent cette musique avec une maîtrise instrumentale et une ardeur juvénile rappelant judicieusement que Schubert n'avait pas même 30 ans lorsqu'il composa ces trios.